le Dieu Impatient

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« Écrire ! Verser avec rage toute la sincérité de soi sur le papier tentateur, si vite, si vite parfois que la main lutte et renâcle, surmenée par le dieu impatient qui la guide… »
Colette, La Vagabonde

 

25 Mai En quelques gestes

En quelques gestes, nous avions tout retrouvé. Comme si nos corps avaient mémorisé l'amour, ils n'avaient plus qu'à répéter les mêmes rituels sacrés et, à tous les coups, rayonnants et guérisseurs. Le silence accompagnait chacun de nos mouvements : nous savions que notre étreinte, l'enchaînement des cérémonies qui s'ensuivait était la meilleure des paroles entre nous, mille fois apprise, mille fois répétée déjà au cours de nos étreintes passées. D'abord la cérémonie des visages, des bouches jointes aux lèvres ouvertes et aux langues emmélées. Déjà, nos souffles ne faisaient plus qu'un. Je ne savais plus qui de nous expirait, inspirait, respirait,...

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24 Mai Seins de pierre

Ce que je vous ai demandé, je ne l'avais jamais demandé à personne. Nous ne connaissions pas, ou à peine. Après quel enchaînement des faits, quelles circonstances vous ai-je posé une telle question ? Les détails, le cadre extérieur, je ne m'en souviens plus très bien. Je pense que nous étions l'un en face de l'autre. Il n'y avait rien autour de nous, nous étions comme dans un nuage, ou dans un jardin à l'herbe douce, sous un ciel pâle. Nous étions seuls, et c'est cela qui comptait, et rien d'autre. Quelques minutes avaient passé, je ne crois pas que nous...

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22 Mai La cracheuse de valda

L'image me vient après qu'elle ait prononcé cette expression à la fois vulgaire et étrange une seconde fois en moins de dix minutes. Je ne sais pas pourquoi, elle me fait penser aux pratiquants de rituels insolites, à ces fakirs qui cherchent à  hypnotiser les serpents, ou aux avaleurs de sabres...

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20 Mai Deux silhouettes

À chaque fois c'est pareil. Il se pince les lèvres, tandis que les pneus crissent encore sur le gravier qu'ils contrôlent mal, que la voiture commence à gravir la montée raide, lentement, toujours trop lentement. Ces deux silhouettes, en contre-bas, derrière la haie et le muret de pierres, elles restent comme plantées, et il voudrait qu'elles disparaissent plus vite, plus discrètement, puisqu'il ne peut les emmener avec lui. Ne doit-il pas rejoindre Paris, ou peut-être même plus loin ? N'a t'il pas maintenant d'autres seins où reposer sa tête, d'autres épaules à étreindre ? Il a sa vie, quelque part, là-bas....

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19 Mai Chapitre 13 – Brunhilde

C’est un samedi matin. Je me suis réveillé, poursuivi par un rêve sur ma mère. Cela fait exactement trois mois, jour pour jour, qu’elle est morte. Était-ce le premier signe qu’elle m’envoyait de l’au-delà ? Était-ce la permission que j’attendais pour me libérer de tout ce que je crois être, à tort ou à raison, noué par elle ? Allais-je enfin pouvoir faire son deuil ? Depuis sa mort, je suis à la recherche d’une relation avec elle. Je voudrais la retrouver, la sentir, la reconnaître dans des signes, mais je n’y parviens pas. Sans doute a-t-elle mis trop d’années à mourir...

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17 Mai Sexe intellect

Beaucoup trop d'érections solitaires et inutiles, de sexes déprimés et délaissés, de seins soutien-gorgés, de corps oubliés et de fantasmes bientôt évanouis pour des demains aussi peu probables que l'au-delà paradisiaque. Quel gâchis ! Quelle tristesse humaine, nous qui voulons tant exalter la vie, exulter par nos meilleurs organes, exploser des joies de la communion humaine. Tout est corseté, interdit, impossible, limité, recouvert.  Que de temps perdu, quel malentendu...

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14 Mai Mes Philippines

C'est à croire qu'elles ont colonisé le quartier. À chacun son tour. On les croise tout le temps. Pourtant, ce n'est pas faute qu'elles soient discrètes. Elles sont plutôt petites et menues, face à nos gabarits d'occidentaux bien nourris. Et puis, elles ne nous voient jamais. Ce n'est pas faute, à chaque fois, que je cherche leur regard, un petit sourire tout prêt au coin de mes lèvres. Mais elles ne me voient jamais, elles ont compris qu'elles n'existaient pas pour nous, ou si peu. Elles marchent les yeux dans le vide. Leurs mains ne sont pourtant jamais vides. Poussettes bourrées de...

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13 Mai Méditation*

Cette poitrine qui se soulève, et s'affaisse, se soulève, et s'affaisse encore. Le souffle qui circule, ce mécanisme merveilleux qui me fait vivre de l'air qui vient de la mer, de la terre et que le soleil réchauffe pour qu'il caresse mieux mes poumons. Je le répète depuis ma naissance. C'est ma vie. Le miracle de ma vie. Par quel mystère suis-je venu au monde ? Un jour, ce souffle se figera. Ce sera fini. Je suis curieux de savoir si ce sera au moment de la montée, ou de la descente. Je me dis que je préfèrerais celui de...

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11 Mai M’endormir

J'eus la tentation de m'endormir, je vous l'avoue. Pour que le temps passe plus vite et me rapproche de félicités merveilleuses. Il y aurait eu une belle femme brune, songeuse et silencieuse, veillant à mon réveil en m'entourant de sa beauté protectrice. Plus tard, une fois ravivé et conscient de sa confiance, de son amour et de ses promesses pour moi, la grâce et l'inspiration feraient pleuvoir des lignes et des chapitres et des oeuvres, enfin. Oui, le sommeil, comme tueur de ces heures creuses de tout, et porteur de miracles. Je ne serais pas ingrat. Je lui rendrais toute l'intensité dont...

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11 Mai Peau de chagrin

Ses traits se sont affaissés, son visage s'est alourdi, comme s'il se figeait déjà. Sous le poids des années, du refuge de la bonne bouffe et des verres. Il est méconnaissable...

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