Mon petit homme blond

07 Déc Mon petit homme blond

Cette journée était offerte au petit homme blond. Celle de demain le sera aussi. Il est à côté de moi, les jambes croisées, étendu sur son lit, à surfer sur son iPhone. Il regarde apollo alunissant, m’a t’il dit à l’instant. Tout à l’heure, c’était la bataille de Marathon qui captait toute son attention, et j’avais le plus grand mal à le rendre un peu présent à moi, alors que nous étions l’un en face de l’autre, au restaurant. Le moment était pourtant choisi : la fondue savoyarde, tant espérée, tant attendue, allait bientôt aterrir à notre table. Les conditions étaient réunies pour que j’essaie, d’homme à homme, d’avoir des vrais propos. De père à fils.

Lui, quel chanceux, me disais-je… Combien de père ont-ils jamais manifesté d’intérêt ou d’ouverture pour leur fils et, surtout, essayé l’écoute ? Le mien était aimant, souvent délicieux, mais la plupart du temps distant. Une autre époque, et les restes chez lui d’une éducation marquée de rigidité victorienne sans aucun doute, sans nécessité de nous faire tous remonter au XIXème siècle.

Mon fils, à côté de moi. Nous descendions toute la journée des pistes de ski. J’allais de plus en plus vite, pour lui donner l’exemple de l’audace, du courage et de la passion qui, au ski, est chez moi la plus palpable. D’essayer quelque chose, quoi… Je voulais ces heures en tête à tête, passées avec lui, depuis si longtemps.

Sortis de la rigueur de la journée et des exploits sportifs, nous avons fait les fous ce soir, nous avons beaucoup ri, et envoyé des messages à sa mère qui ne pouvaient que la choquer et l’émouvoir.

Je  suis saisi de joie en découvrant certains traits de son caractère, bien à lui, uniques, nouveaux. Il a quelque chose d’aïgu, de sensible, d’émouvant, et il sera jouisseur et sensuel aussi. Plus que son père, tant mieux pour lui.

Que vais-je lui laisser, que vais-je lui transmettre ? Ne l’ai-je pas tétanisé par mes défauts, mes impatiences, mes suffisances ? Qui suis-je, et qu’ai-je fait de bien pour lui ?

Qu’il est troublant de ressemblance avec moi ! Je suis tellement heureux de l’avoir et, en même temps, tremblant pour son avenir. Je devrais plutôt être confiant, et je sens qu’il saura faire. Il a le charme, la beauté que je n’avais pas. Mais il a la sensibilité, la fragilité que j’avais, et il me semble plus tendre encore.

Il sait que j’écris.  Il connait aussi l’existence de ce blog qui ne l’intéresse pas du tout. Il ne lira probablement pas ces lignes avant bien des années, peut-être jamais. Je le lui ai dit, je le lui redit, et je l’écrit ici : je l’aime, je l’aime, je l’aime !

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