le Dieu Impatient

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« Écrire ! Verser avec rage toute la sincérité de soi sur le papier tentateur, si vite, si vite parfois que la main lutte et renâcle, surmenée par le dieu impatient qui la guide… »
Colette, La Vagabonde

 

12 Déc Agata

C'était vous ce soir. Nous avions échangé quelques mots, déjà, à l'Hôtel de Ville. La réception touchait à sa fin, nos verres de vin blanc, au cocktail, venaient du même plateau, du même serveur. Le bon hasard a bien voulu que nous nous retrouvions l'un en face de l'autre, au cours du dîner, dans le restaurant à côté, réservé pour notre soirée de rencontre franco-cracovienne. Votre élégance stricte, les codes de la femme d'affaire, n'endiguaient pas votre charme. Alors je suis monté à l'assaut, brave petit soldat, de votre technique, de vos satellites, de vos composants électroniques, de vos voyages d'affaires et...

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11 Déc Dans un ciel sans nuages

J'ai dû m'assoupir un peu. Pourtant l'avion glissait dans un ciel sans nuages. Je n'ai eu, de ce songe, qu'une vision : je sortais d'un photomaton, qui produisait au même moment quatre photos, dont les couleurs luttaient dans la pénombre. Ce n'était pas moi, ce n'était pas mon visage. Des formes indistinctes et nombreuses, comme des milliers de points qui se répétaient sur chaque cliché. Et puis, je n'ai pas eu le temps d'en voir plus. L'image s'est évanouie. Le papier de cellulose s'est mis à briller de toute sa nudité. J'ai ouvert les yeux. Je suis toujours assis contre le hublot....

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09 Déc Une voix

Une voix qui parle comme on chante, au dessus du ruban de l'autoroute, et qui m'enlève vers le ciel. Une voix jaillissant comme l'eau vive du torrent, enluminée de vent et de soleil. C'est une émission de France Culture. L'invité est en retard. Alors, la voix doit composer, inventer, lancer des rubriques imprévues. Et j'écoute, passionné déjà, sans même entendre de quoi il s'agit. Peu importe, je suis conquis, les kilomètres glissent sous la voiture, incognito. Mes sensations s'élèvent en colonnes vers ces courants d'airs chauds où résonne le timbre magique, féminin et frais. La séduction qu'une voix peut exercer est une...

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08 Déc jour de blog

J'ouvre word et c'est la page blanche qui illumine l'écran de sa candide insolence. J'ai rendez-vous avec mon blog ce soir, puisque j'ai manqué à mes devoirs ce matin. Des obligations qui n'engagent que moi. J'y avais rêfléchi au cours de la journée. Quel sujet aborder ? L'écriture, je peux toujours, et c'est d'ailleurs elle qui tient la corde, dès le premier galop et les cinq premières lignes dévalées par mon clavier. On peut écrire des pages et des pages sur la recherche de l'écriture et de l'inspiration - j'adore François Weyerganz pour cela. La littérature, l'amour de la beauté ? J'ai...

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07 Déc Mon petit homme blond

Cette journée était offerte au petit homme blond. Celle de demain le sera aussi. Il est à côté de moi, les jambes croisées, étendu sur son lit, à surfer sur son iPhone. Il regarde apollo alunissant, m'a t'il dit à l'instant. Tout à l'heure, c'était la bataille de Marathon qui captait toute son attention, et j'avais le plus grand mal à le rendre un peu présent à moi, alors que nous étions l'un en face de l'autre, au restaurant. Le moment était pourtant choisi : la fondue savoyarde, tant espérée, tant attendue, allait bientôt aterrir à notre table. Les conditions étaient...

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01 Déc La Fauvette Grise

Chaque fin d'après-midi, c'était le même chemin. Le retour de l'école était une procession longue et rituelle, ponctuée par l'arrivée à la maison et la joie de retrouver ma mère. Il me reste peu de souvenir du parcours : j'ai eu du mal à le retrouver lorsque, de passage à Bois-Guillaume il y a quelques mois, j'ai voulu l'emprunter de nouveau. Il y a eu beaucoup de constructions depuis, les villages savent mieux rajeunir que nous sans que cela les embellisse. Sainte Vitrice était ratatinée contre des immeubles modernes et sans charme. Des salles de classe en préfabriqué cassaient la cour de...

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30 Nov Un aria de Bach

Mes pas sonnaient sur le trottoir. J'ai bientôt senti, je les voyais presque, des vibrations qui s'élevaient vers le ciel. Elles étaient poussées par un orchestre joyeux. Je finissais ma promenade sabbatique, celle qui sert à chasser les fatigues de la semaine et les botter avec les feuilles mortes dans le caniveau. Quelques notes étaient revenues en tête. Un aria de Bach entendu plus tôt ce matin m'accompagnait et me mettait en joie. J'ai tout de suite retrouvé ma propre joie, celle que je vis depuis peu et au quotidien. Celle de l'écriture, de ce blog. Je suis comme un grand gosse...

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29 Nov Sortie des toilettes

Sortie des toilettes. Pardon, je sais, on pourrait faire mieux, mais c'est pas mal d'essayer aussi, non ? Surtout lorsque les toilettes sont mixtes. Allez, j'arrête de faire le communiquant et de tenter des techniques de teasing employées à tire larigot. Il ne s'est rien passé. Qu'un croisement éphémère, quasi virtuel. Et décevant finalement. Elle aussi sortait de son réduit pour se diriger, comme moi, vers le lavabo. Même dans les bureaux branchés de la capitale, les vieux codes ont la vie dure. Nous étions aussi gêné l'un que l'autre de nous retrouver là, les mains pendantes sous le robinet, sous la...

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26 Nov Belle du train – suite et fin

J'attendais, le souffle court et la poitrine serrée, l'approche de la ville de Stuttgart. J'avais réflêchi aux différents scenarii. Surtout, je ne voulais pas effrayer ma belle voyageuse. Je ne voulais pas non plus me comporter trop lâchement. Déjà, je savais bien que je n'irai pas plus loin, que je ne tenterai rien. Au moins, j'avais décidé de ne pas flancher, et de ne pas la quitter de vue sans avoir accompli le plus grand geste dont j'étais capable. Mais quand ? Fallait-il attendre que nous marchions sur le quai ? Elle risquait de m'échapper dans la foule. Pire, un homme...

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26 Nov Belle du train

Elle est assise juste en face de moi. Parfois, nos pieds se touchent, nos genoux se frôlent. Nos regards se croisent aussi, moins souvent. Elle est montée dans le train juste avant le départ, alors que je m’étais installé, étonné d’être seul, au premier étage du wagon. D’ailleurs, elle aurait pu choisir une autre place, mais elle a préféré garder la sienne. C’est le hasard des réservations de la SNCF, qui a décidé de cette rencontre ce matin. Elle a glissé sa valise sous son fauteuil, ce qui m’empêche de pouvoir étendre mes jambes et me contraint de les croiser, dans...

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