le Dieu Impatient

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« Écrire ! Verser avec rage toute la sincérité de soi sur le papier tentateur, si vite, si vite parfois que la main lutte et renâcle, surmenée par le dieu impatient qui la guide… »
Colette, La Vagabonde

 

23 Avr Amour russe

Ce sont des bouleaux à l’écorce blanche comme la neige, tachetée de sombre comme des éclaboussures, à perte de vue. C’est une terre de sable ou de grains de poussière brune écrasée par les chaleurs au printemps. C’est un peuple immense et lointain, perdu dans des paysages extrêmes, ou des foules grouillantes dans des villes tentaculaires. C’était, il y a longtemps, la visite du monastère de Zagorsk. Pour monter au sommet du clocher de l'église Saint Serge, dont on lui avait dit qu'il offrait une vue unique, il avait dû réveiller le gardien pour qu'il lui ouvre les portes, alors qu’il était le premier...

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21 Avr Vous n’auriez pas dû

- Non franchement, il ne fallait pas… Ses joues cramoisies trahissent son plaisir. - Vous n’auriez pas dû… Elle est tellement heureuse qu’il l’ait fait. Elle qui se sent si légère, comme si d’un coup elle allait s’élever dans les airs et survoler le monde à la vitesse du plaisir. Lui ne dit rien. Il la regarde, sans sourire. Toute expression semble s’être échappée de son visage, à lui qu’elle imaginait beaucoup plus expressif, lisible, à la portée de sa sensibilité… Ses yeux fixent longtemps les siens. Elle baigne dans une vague de douceur. Parfois, elle voit bien qu’il parcourt son corps. Des cheveux...

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19 Avr Littéralement

Ce mot fonctionne t'il assez pour faire un beau titre ?… alors il faudrait que je lui trouve un beau texte. Il est rarement utilisé à de nobles fins, il cotoie très peu sa soeur aînée littérature qui, il faut le dire, prend beaucoup de place. Il est vrai qu’on l’a relégué à de basses fonctions, un peu comme un gardien de la paix qui veille à la bonne circulation, ou plutôt à un contrôleur qui vérifie l’exactitude des mots, des situations, des choses. Comme si tout devait être plaqué au sol, avec une signification unique : au doigt et à l’oeil,...

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16 Avr Nos folies ordinaires

- Franchement, tu es sérieux ? Elle me fixe avec des yeux ronds d’étonnement. - non, je ne vois pas les choses comme toi. C’est vrai. Elle est une femme d’action, elle est active comme moi. Plus que moi, car j’ai l’impression qu’il ne lui est jamais venu à l’idée de réflêchir à ce sujet. - je n’ai jamais pensé une chose pareille. Bon, c’est bon. Je rétropédale et change de sujet. Nous finissons notre déjeuner sans revenir à mes sujets un peu glauques et poisseux, mieux vaut le sable clair et le sang chaud des affaires. On en profitera pour dire du mal de...

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14 Avr Tu me manques

Toi qui apparais et disparais. Toi qui te joues peut-être de moi. Toi qui te protèges de moi. Toi qui t’essores avec tes propres douleurs, à les répéter et les renouveller sans cesse. Toi dont je sens la présence dans les atomes de douceur que le vent me ramène en cet après-midi béni de soleil. Sais-tu ? Je les ai vu voleter, tout à l’heure, entre les buis et les pelouses, ils m’apportaient ton visage et ton sourire. Toi dont l’absence et la distance creusent des rides de tristesse dans mon coeur. Toi dont la beauté m’émerveille et me ravis. Sais-tu...

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14 Avr Gratitude

Trouver la paix, tu as l’impression que c’est le plus difficile. C’est pourtant le plus simple, le plus facile. Il te suffit de fermer les yeux et de chercher quelques instants de silence. Tu commences à écouter ta propre respiration et, ce faisant, tu remarques que celle-ci se ralentit. Et tu entends alors les cristaux de l’air que tu inspires. Soyeux et doux, ils parcourent ton corps, creusent ta poîtrine, comme une longue caresse. Un souffle qui dénoue tous les noeuds de ton âme, et qui les détache longuement dans une expiration délivrante. Et ce mouvement, tu sens qu’il est...

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14 Avr Un moment particulier

Quand tu regardes en arrière, sur toutes les années que tu as laissées derrière toi… Tu sais, ce regard, celui que tu commences à porter dès que tu as franchi la trentaine, et qui s’alourdit au fil des années. Tu te plains du temps perdu, de toutes les occasions manquées. Si tu regrettes certains choix, c’est surtout l’absence de logique avec leurs conséquences qui reste une énigme pour toi. C’est le déroulement de ta vie que tu ne comprends vraiment pas. Comme si le fil qui la guide était tellement invisible qu’il n’existait pas. Tu voudrais t’imaginer qu’un retour est possible. Une...

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12 Avr Célébration

Je connaissais mal son visage, je n’avais qu’une photo d’elle. Je ne connaissais même pas sa voix. Nous ne nous étions jamais rencontrés. Et maintenant, elle était assise en face de moi. Le miracle s’était produit, et je me disais que la vie vaut d’être vécue, si elle peut produire de tels miracles. Je voudrais passer sur les détails, sur le déroulement apparemment si banal du début de notre première rencontre, de tout ce qui se passait là, devant moi, en moi aussi. Je voudrais dire l’émotion qui me submergeait, les mille et unes impressions que me procuraient enfin son apparition...

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09 Avr Petite soeur

Tout à l’heure tu sais, je désespérais un peu. C’était la fin de l’après-midi. J’étais sorti pour honorer mes marches rituelles au Luxembourg. Ma journée s’achevait, piteuse et vide. Je n’étais rien, et tu n’étais pas là. Les trottoirs qui glissaient vers le jardin, la rue Vavin, la rue Bréa, ils grouillaient de vivants bruyants et joyeux. On aurait cru que la première chaleur de l’année avait provoqué une autre irruption. Celle de tous les passants qui surgissaient de l’ombre et de la fraîcheur d’immeubles encore pétrifiés par l’hiver. On aurait cru qu’ils se ruaient vers le soleil, dont les rayons tournoyaient comme...

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08 Avr Saignées

Je marchais. Un poids pesait sur ma poîtrine, tellement inhabituel que j'en fermais presque complètement les yeux. J’étais appelé, attiré par ce tumulte intérieur violent. Les rythmes puissants d'Archive qui tonnaient dans mes oreilles venaient se conjuguer en une vibration unique. (veins : http://www.deezer.com/album/92443) Ce n'est qu'un peu plus tard, un peu plus loin dans cette progression heurtée, que je l’ai vu. J’avais relevé la tête. Le ciel, d'un bleu intense strié de rubans écarlates et vivants. Telle une chaîr d’azur tendre et pure déchirée par des rivières de sang. Qui s'enfuyaient dans des veines célestes, comme des torrents pourpres qui s'évadaient à...

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