Une sylphide

12 Mai Une sylphide

Un quart de seconde. Ça n’a pas duré plus longtemps, l’image avait déjà changé. Mais suffisamment pour illuminer mon regard comme le flash d’une photo en pleine nuit. Le film d’un groupe de musiciens s’était animé tout seul sur l’écran de mon ordinateur que je scrollais passivement. Une chanson entonnée tour à tour par des dizaines d’artistes confinés, que la technologie unissait pour partager un de ces moments d’émotion collective comme il y en a beaucoup sur la toile en ce moment.

Une silhouette, une voix. Si fugace qu’elle avait déjà disparu avant que le réveil de ma conscience m’ait fait tourner le visage vers l’écran. Trop tard ? Je ne la voyais plus, tandis que son chant se fondait déjà dans celui des autres artistes.

Juste le temps quand-même de voir une silhouette éclairée par une voix si belle. Je l’avais compris tout de suite. C’était une sylphide. L’une de celles qui apparaissent pour disparaître aussitôt. Pour rappeler à des misérables comme moi que la beauté existe et qu’elle sauve le monde, même si elle est rare et insaisissable.

Ces appels de la beauté sont si fréquents dans ma vie que je préfère tenter de les oublier vite dans l’action, l’oubli ou l’incrédulité. Ma seule consolation quotidienne, attendue souvent avec hâte, c’est celle du sommeil. Celui qui ouvre la porte des rêves où, à ce moment seul, tout devient possible. Ce n’est que récemment que j’ai compris pourquoi mon père aimait tant s’endormir de bonne heure… À tel point qu’il n’attendait plus, ou presque, pour aller se coucher. Vers ses vieux jours, l’heure du coucher avançait encore plus vite que l’âge.

Pourtant, je n’ai pas encore abandonné. J’écris malgré la nuit qui tombe. N’aurais-je ici trouvé l’espoir d’espérer, sans avoir à tordre mon coup vers les hauteurs ? Car cette apparition, mi-ange mi-sirène, est revenue ce soir flotter dans mon esprit. Je la sens loin de moi, très loin. Si loin, que tout me force à croire qu’il est fou d’espérer que la beauté existe vraiment. Mais si proche, en même temps, parce que l’essence de la beauté de cette femme-là est plus forte que tout. Elle est éternelle et universelle, portée par toutes les femmes de la terre. Toutes, les mères et les amantes.

 

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