04 Mar Un appel
Pourquoi l’ai-je appelé ? Comment se fait-il que j’avais encore son numéro ? Il décrocha pourtant très vite. C’était sa voix, moins voilée peut-être, plus jeune encore que celle dont je me souvenais.
Il n’avait plus la tendresse ou la gentillesse d’avant. Je sentis tout de suite qu’il avait des reproches envers nous.
– Vous aviez décidé de suivre votre mère. C’est la raison pour laquelle je suis parti, j’ai refait ma vie. J’ai voulu finir en beauté, pour les quelques années qui me restaient encore à vivre.
Nous nous sommes regardés les uns les autres. Nous étions restés auprès de notre mère après sa mort il y a cinq ans au moins. Il venait d’avoir quatre vingt ans.
Ma soeur s’exclama :
– Je savais bien que son coeur battait encore. Je l’avais senti, j’avais posé ma main sur sa poitrine. Je n’avais pas cru à sa mort.
Je me suis réveillé, il le fallait. J’ai rappelé les souvenirs de sa mort, le masque apaisé et froid, le corps raide. Lui étendu dans sa chambre sur un lit funêbre alimenté par des poches de glaces et un circuit électrique, pour garder la température la plus basse possible. Je me souviens du contact de ses joues, encore souples mais sans aucune chaleur. Je me suis souvenu, également, la lente descente de son cercueil dans un caveau entrouvert et, bientôt, la dalle qui le recouvrit et se referma sur lui.
Varsovie
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