le dieu idiot

06 Nov le dieu idiot

Elle savait bien que quelque chose avait changé. Au réveil, elle s’était sentie encore plus fatiguée, comme au bout d’une nuit blanche. Elle avait pourtant dormi, d’un sommeil lourd, long et sans rêves, telle une plage déserte au sable gris, étirée jusqu’à l’épuisement, sans jamais finir dans la mer.

Elle n’aurait jamais l’énergie d’affronter la journée qui menaçait. Déjà, son ventre lui faisait mal, une de ces douleurs sourdes et fidèles qui revenaient de plus en plus souvent. De la paume de la main, elle effleura son visage. D’un geste semblable à une caresse égarée, elle toucha une joue, l’autre joue, puis le front, que les cheveux encore négligés libéraient. Sa peau lui paraissait creuse, mate et sans vie. De ce corps encore jeune, elle voulait ignorer les premiers signes qui signifieraient les début des longues fins qui attendent toutes les femmes. L’évanouissement lent et inéluctable de la beauté ou, au moins, des beautés que, trop rarement, ses amants célébraient encore.

Elle aurait voulu se révolter. Mais contre qui ? Quel dieu idiot avait-il décidé ainsi que les femmes devraient toujours vieillir plus vite que les autres ? Et pourquoi les hommes, en attendant, se montraient-ils si pauvres, si dénués d’eux-mêmes, d’un minimum de présence et d’intuition ? Pourquoi tant de gâchis, de vies pour – presque – rien, de solitudes parallèles et si rarement croisées ?

1commentaire
  • Louis de Sagazan
    Posted at 09:22h, 09 novembre Répondre

    Détrompe-la dieu trépignant ! Au fond d’elle : une plénitude, un lac sans ride reflétant l’instant désaturé d’un ciel pur et libre. Autour d’elle, effleurant sa rive, des tas d’autres et leur lac.
    …ah… L’apparence… Quel mensonge ! Aliénation !…
    Écoute un peu saint dieu !

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