10 Jan Je ne suis pas mes pensées
Nuages d’un ciel de janvier si bas qu’ils obscurcissent mon esprit.
Mes pensées ne sont pas des réalités, elles ne sont que des ombres.
Je ne suis pas mes pensées, elles ne sont pas moi.
Qu’est-ce que la pensée ? Un vagabondage de l’esprit ? Une projection de l’imagination ? Des émotions, le mélange de croyances et d’impressions qui se transforment en illusions de la réalité ?
J’écoutais deux sages tout à l’heure à la radio. Ils tentaient de répondre avec beaucoup d’humilité, de recul et de sagesse à la question : où est Dieu ? Une autre question m’a frappée : Dieu est-il fragile ?
L’homme recherche Dieu. À l’évidence, son créateur s’est arrangé pour devenir tellement invisible que, la plupart du temps, l’homme ne peut entamer sa recherche qu’en partant de sa propre image et de sa ressemblance. En imaginant mieux…
En fait, notre existence est une quête permanente d’une réalité plus dense, incorruptible, éternelle et aimante. Les rêves sont des esquisses de cette réalité. C’est sa propre divinité que l’homme ne cesse de rechercher.
Englué dans les contingences de ce monde, l’homme tombe trop souvent dans la confusion. L’une des plus graves, je crois, est de considérer que ses pensées sont la réalité. À commencer par la sienne : l’homme repère sa propre identité à partir du flux de ses pensées. Il confond la silhouette fantomatique de son ego avec sa propre essence. Il en est de même pour son existence : Tel Don Quichotte à l’attaque des moulins, l’homme s’invente des luttes, des ennemis et des peurs qui conditionnent et limitent ses actions.
L’homme est appelé à cette divinité dont il a si souvent gardé, depuis la toute petite enfance, le goût et la nostalgie. Pourtant, ce n’est pas à partir de lui-même qu’il peut atteindre cette divinité. C’est la grosse erreur, je ne peux comprendre pourquoi, mais c’est comme ça. Je vois que la plupart du temps, le mal que créé l’homme, à commencer par celui qu’il se fait à lui-même, provient de cette déviation qui consiste, en ce faible démiurge, à transformer ses pensées en réalité.
Je ne suis pas mes pensées : la vie et l’amour sont des valeurs plus grandes que la pensée. Elles la dépassent absolument. Si je suis l’initiateur de mes pensées, je ne suis maître ni du souffle qui m’anime, ni de ceux que j’aime.
C’est une évidence rassurante, pour le coup. Elle me permet de relativiser le pouvoir de mes pensées les plus bloquantes. Surtout, elle me convainc qu’une réalité “supérieure” me dépasse. Celle qui ne dépend pas de moi, celle qui est au principe de la vie. Celle que nous appelons Dieu.
“J’étais présent avant que tu me cherches” a t’il dit.
Que son visage me soit souvent si difficile à reconnaître n’est pas trop grave. L’apaisement vient déjà de cette reconnaissance de la vanité de mes pensées, et de l’évidence que le divin ne dépend pas de moi. Qu’il est avant moi et que tout en moi est prêt pour répondre et prolonger ce divin : c’est moi qui suis à son image et sa ressemblance…
Cet apaisement est la clé qui ouvre la porte de la gratitude et de l’accueil du réel.
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