04 Déc J’avais laissé de côté ma chevelure
J’avais laissé de côté ma chevelure, mes binocles et le foulard coquet qui me recouvrait la gorge. Maintenant, mon crâne nu luisait et cuisait sous les néons crus et les chauffages d’appoint rougis et gonflés comme des bûches prêtes à exploser. Je sentais le poids des poches qui se creusaient sous mes yeux et gonflaient comme des outres, tandis que les plis et surplis, glissés sous mon menton comme des petits nuages sombres et mauvais, ne se cachaient plus.
Je jettais encore des regards désespérés vers la postiche qui gisait, fatiguée et sans forme, sur la banquette à côté de moi. Je suivais les mèches blondes qui s’accrochaient au sky rouge et bouclaient en points d’interrogation plutôt que de me répondre.
La belle affaire ! J’étais nu comme un ver, plus démuni que le pire des hameçons livré aux mâchoires du tout venant.
Ça m’apprendrait à sortir de ma coquille ! Par la fenêtre, j’avais vu qu’il y avait du monde. De la lumière, du bruit, de la vie. C’était la terrasse d’un restaurant, sur le boulevard. J’étais entré dans la salle, innocent et candide. J’avais cru qu’il y aurait à qui parler. Comme personne ne se rapprochait de moi, j’avais commencé à me défaire de mes apparences. Je lançais des regards éclairés et légers dans l’air, je souriais, je crois même que je commençais me sentir presque heureux.
J’ai attendu quelques instants, qui m’ont paru très longs. Je croyais que je me mettais au niveau de tout le monde, et qu’on allait se reconnaître, enfin. En humanité, en dénuement, en toute simplicité.
J’ai fini mon café, j’ai bu le verre d’eau qu’on m’avait donné avec. En silence, je suis reparti tout seul.
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