J’ai rencontré Philippe Sollers

14 Nov J’ai rencontré Philippe Sollers

C’est au moment où je traversais la rue. Je laissais derrière moi les grilles du jardin du Luxembourg que j’avais trouvées fermées. Il n’était pourtant pas si tard, cela ne fait longtemps que je suis revenu habiter dans le quartier. J’avais oublié qu’ici, on ferme tôt, sous prétexte d’hiver et d’obscurité.

Je relevais la tête. J’ai croisé votre regard. Vous me fixiez. Cela n’a duré qu’un quart de seconde, peut-être un peu plus. Il m’en a fallu un autre pour vous reconnaître. Je dépassais déjà la terrasse, vous regardiez ailleurs.

Je me suis arrêté un peu plus haut, dans la rue Vavin. À hauteur du fleuriste dont la devanture, jour férié oblige, n’envahissait pas le trottoir de ses cascades de fleurs multicolores et des végétations hardies qui me ravissent à chaque passage.

Peut-être étais-je en train de passer à coté de mon destin ? J’hésitais fortement… Je brûlais de l’envie de venir vous parler, ne serait-ce que quelques secondes, sans davantage vous déranger. Mais voilà, peut-être que vous… peut-être que…

Rassurez-vous, je connais votre goût des femmes et des conquêtes féminines, c’est un des aspects de votre personnalité que j’apprécie. J’aimerais m’y reconnaître aussi. En attendant, pas de problème pour reconnaître en vous l’un des grands écrivains actuels, un de ceux qui ont compris la féminité et qui savent la décrire comme rarement.

… Il s’agissait bien-sûr de mon blog, de mon écriture, pourquoi pas de mes romans. J’aurai aimé vous en parler. On ne sait jamais ? J’ai redescendu lentement la rue en votre direction. Maintenant, je vous voyais de dos, seul à votre table. Sans rien dans les mains, rien sous les yeux, vous sembliez accessible.

Je n’ai pas osé. J’ai craint de venir troubler un moment de solitude… La nuit, la fraîcheur de l’air, le vide désertique qui balayait la rue d’Assas à cette heure. Tout cela m’a découragé. J’ai pensé aussi que ma démarche vous irriterait. Je connais votre cynisme. Et puis, des écrivains en herbe qui doivent vous importuner, il doit y en avoir des tonnes. Je ne voulais pas être de ceux-là.

Je n’ai pas encore tout à fait renoncé. Peut-être irais-je roder de nouveau aux alentours, si jamais vous aviez vos habitudes dans ce café ? Et déjà, ce texte, une bonne onde que je vous envoie. On ne sait jamais. Peut-être vous souviendrez-vous de moi ? Vous savez… même si cela n’a duré qu’une seconde, ça y est, nous nous sommes déjà rencontrés.

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