18 Sep Brook Green, Hammersmith
Cette fois-ci, je ne me suis pas fait surprendre par le trafic qui peut bloquer complètement les grandes artères de la ville comme je ne l’ai jamais vu ailleurs. Je suis même arrivé en avance, tellement en avance que j’explore les rues de ce quartier de Londres que je ne connais pas. Je n’y étais venu qu’une seule fois, mais si vite que je n’en avais presque rien vu. J’avais même appris qu’un cousin anglais y habite, et je l’avais plaint de devoir habiter une banlieue apparemment si éloignée du centre et dont je ne connaissais pas le charme.
J’ai bien repéré où serait le rendez-vous et, plutôt que de chercher un parking sous terrain, je cherche un coin proche et tranquille, d’où je pourrai me reposer et aller à pied, sans me presser.
J’avais déjà été charmé et surpris, pour arriver depuis le centre de Londres, de découvrir des ruelles fleuries et ravissantes de Kensington que je croyais pourtant si bien connaître. Mon père ne m’avait-il pas fait connaître ce quartier chic de l’ouest londonien ? Il y était né, il y avait passé une bonne partie de son enfance. Il m’avait aussi raconté, au cours du Blitz, alors qu’il était en permission en plein milieu de la guerre, avoir escaladé le toit et jusqu’au clocher de l’église de High Street pour, au moyen de longues perches, jeter les bombes des raids aériens allemands qui n’avaient pas encore explosées, et qui allaient s’écraser plus bas, en creusant des cratères impressionnants dans la rue que les services d’ordre avaient sécurisée.
Hammersmith. Et la rue qui s’élargit sur une coulée de verdure inattendue, où s’échappe un gazon bien anglais à l’ombre d’arbres imposants et lourdement feuillus. Je choisis d’y garer ma voiture. Je fais quelque pas, et je suis saisi par le charme, la beauté bouleversante du lieu. C’est le coeur de l’après-midi. Il fait un temps merveilleusement estival. C’est un vendredi après-midi de septembre, et des nuées d’enfants sortent de plusieurs écoles que je n’avais pas remarquées et qui longent le petit parc intérieur. Je suis frappé par la beauté de la plupart d’entre eux, qui viennent se méler dans ce grand jardin qui leur offre la possibilité de jouer et de goûter leur joie d’être ensemble, accompagnés par leurs parents qui se tiennent souvent à l’écart et contemplent la scène comme moi. Je suis enchanté par le ballet qui commence, les enfants portent tous des uniformes qui marquent chacun leur école respective, et ils symbolisent aussi la pluricité ethnique qui semble tellement plus harmonieuse de ce côté-ci du Channel : toutes les couleurs des continents qui peuplent Londres : l’Europe, l’Asie, l’Inde et l’Afrique. J’entends très souvent des enfants qui parlent en français avec leurs parents.
Je surprends une jeune femme, probablement en charge d’accompagner un groupe d’enfants chez eux. Elle court et zigzague autant qu’elle peut, en riant aussi fort que les enfants qui tentent de la rattrapper ou de l’asperger avec leurs petites bouteilles d’eau. Parfois, elle se laisse prendre, puis elle s’échappe, et le ballet insouciant et heureux se reproduit deux, trois, quatre fois.
Je suis assis sur un banc, je pourrai regarder ces tableaux de bonheur pendant des heures. Il fait chaud, septembre répand ses lumières d’or qui transforme l’air et la terre en paradis. Une grande nostalgie m’étreint. J’aurai pu vivre ici. Le bonheur est à Hammersmith.
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